Exercice à trous - Annie Leroy
EXERCICE A TROUS
Un jour de l’été passé, en longeant la rivière, je fus saisie par la beauté du paysage qui s’offrait à ma vue. « Oh ! Comme j’aimerais savoir peindre et fixer ces merveilles sur la toile ! » M’écriai-je.
« On n’est pas obligé de faire des tableaux » me répondit mon amie Claude. « N’est pas RENOIR ou MANET qui veut ! » « Je n’en demande pas tant. Je serais simplement heureuse de déployer mon chevalet, ma palette, et, uniquement par passe- temps, tout en rêvassant, de laisser mes pinceaux balayer la surface blanche »…
L’amour du paysage entraîne les yeux et le cœur vers de délicieux voyages magiques.
De verts bocages sortent du néant ; mille fleurs ; mille insectes (papillons, libellules, sauterelles, coccinelles …) et des centaines d’oiseaux vont et viennent, joyeusement, et s’éloignent sans bruit.
L’imagination se perd dans les routes silencieuses et les cervelles fertiles reconstituent les contes et légendes de notre enfance.
Nous ressentons une émotion qu’aucune langue ne peut décrire.
Alors que le soir tombait, je vis un couple de libellules qui profitait des derniers rayons du soleil. L’une montait vers le ciel pendant que l’autre allait se désaltérer dans une flaque d’eau. Elle dériva lentement sur la gauche, et, rafraîchie, regagna les herbes hautes qui bordaient la rivière. Je la vis entrer dans une sorte d’abri. Sa compagne – ou son compagnon, je ne sais ? – s’y trouvait déjà.
Je crois bien que leurs retrouvailles, préludes à de tendres rapprochements, furent l’occasion de contribuer à la préservation de l’espèce !
Quelques instants gagnés sur une mort certaine, ce qui serait arrivé si elle était entrée toute seule… car, comme la beauté, les libellules sont « éphémères », quoiqu’il advienne !